de Thiên Nga à Dao : Hà Nội, le 20 mai 1954




Toi,

     Ta peau, effleurée de mes doigts. Ta peau, polie aux froissements soyeux de nos chairs. Source vénielle et touchers capitaux. Mes doigts clairsemés de rêves brésillent sur ta peau. Tout mon être s’embrase de rouge désir. Un magma aveuglant de lumière me liquéfie et m’engloutit dans la tourbillonnante course d’un fleuve immense. Fracassement de corps en dérive, méandres siphonnant et passages acérés.

Je veux faire naufrage sur tes rives d’îles sauvages pour savourer tes silences, sombrée dans ces nuits noires qui estompent, à chaque petit jour, leur clarté d’amour. Tes mains ondulent, calligraphient leur danse sur ma peau que tes doigts incisent dans mon corps écartelé d’amour. J’ai suspendu mon âme à tes yeux. De ta bouche hirondelle s’envole chacun de mes frissons. A peine tes pas sont-ils au bout du monde que mes mots ne sont plus qu’un carnage d’émotions violettes, un carnet de vie désaffectée. 

Lippe contre nymphe sur des rives charnelles d’argile rose, un mascaret de nectar à l’estuaire de ton désir. Caresse nourricière. Ondulation lente d’un python dans ma gorge religieuse. Chuintement d’aveux. Mains jointes dans une prière d’extase, escapade de mots, roulements d’ivresse absolue. Éclaircie du temps, perdu et renaissant. Écume de salive dans une extase pourpre.
Moi, ivre de ton encre blanche, onctuosité pervertie de plaisir. Mes lèvres galbées de lune attisent tes paupières. Ma chair, amante, indécente, ruisselle sur ta chair sanguine.
A mots nus, je dessine ces étoiles qui peuplent mon âme, ces vagues purpurines qui inondent mon cœur. Ta beauté en douceur exacerbe mes sens. Laisse mes reins enchevêtrer tes hanches, un siècle ou deux. 

Pacte de chair, indolence du temps irréversible.

Je ne te demanderai jamais rien, mais sache que je veux tout.

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